Potentiel International

SOMMET RDC – RWANDA DANS L’IMPASSE

La rencontre des présidents Kagamé et Tshisekedi prévue dimanche dernier à Luanda n’a plus eu lieu. Kagamé n’est plus venu.

Il fallait s’y attendre. C’est le moins que l’on puisse dire compte tenu des tensions qui persistent entre Kigali et Kinshasa. Pourtant les ministres des affaires étrangères des deux pays se sont rencontrés à plusieurs reprises pour préparer la rencontre au sommet des deux chefs d’Etat. Ils avaient même un plan à quatre étapes : analyser le niveau de menace posé par les forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), groupe composé à l’origine de génocidaires hutus rwandais ; mener les actions ciblées pour neutraliser les FDLR et leurs alliés ; faire un bilan des opérations afin de mesurer l’efficacité. La quatrième phase prévoyait la stabilisation avec la démobilisation de tous les groupes armés actifs à l’est de la RDC et la normalisation des relations entre Kinshasa et Kigali.Tout ceci devait aboutir à un accord de paix entre les deux pays. Ainsi, hier les deux présidents devaient se rencontrer à Luanda sous les auspices du président angolais. Tshisekedi s’était même déjà rendu la veille pour attendre son homologue rwandais. Ce dernier n’est pas venu, accusant la partie congolaise de refuser de dialoguer directement avec les rebelles du M23. Les deux parties s’accusent mutuellement. La RDC refuse de dialoguer directement avec le M23 estimant que c’est un groupe terroriste qui sème la terreur à l’Est du Congo, soutenu selon Kinshasa, par Kagamé. En fait, de quoi s’agit-il entre ces deux pays?

Les raisons de l’impasse

Le principal blocage dans les négociations entre la RDC et le Rwanda concerne la question du M23. Le Rwanda soutient que la RDC doit engager des pourpalers directs avec ce mouvement rebelle qu’il considère comme un acteur légitime. Kagamé a toujours soutenu que la rébellion du M23 est un conflit congolo-congolais. C’est un problème de marginalisation des tutsis congolais, autrement appelés Bayamulenge par le pouvoir central de Kinshasa qui est à l’origine de ce conflit. Selon Kigali, le gouvernement congolais devrait s’asseoir sur une même table afin de discuter avec ces tutsis congolais pour leur insertion dans la société et l’administration congolaise. Cette exigence a toujours été un préalable pour la partie rwandaise dans les négociations avec son voisin. D’après Kagamé, Tshisekedi doit prendre ses responsabilités en répondant favorablement aux doléances de ces tutsis congolais qui sont à part entière aussi des citoyens congolais, au lieu de désigner le Rwanda comme le bouc-émissaire. Kinshasa n’entend pas les choses de cette oreille. Selon le gouvernement congolais, le M23 est un groupe terroriste soutenu militairement par le Rwanda et participe activement au pillage des ressources naturelles à l’est du Congo. Selon de nombreux rapports avec images, de milliers de soldats rwandais se trouvent actuellement à l’est du Congo dans le soutien de ce groupe rebelle. Kigali justifie la présence rwandaise à l’est de la RDC pour sa sécurité et sa défense contre les rebelles FDLR. De l’avis de Kinshasa, Kagamé a pris effet et cause de ses frères tutsis qui se trouvent à l’est du Congo. Kinshasa estime que ça ne vaut pas la peine de négocier avec ce groupe rebelle à cause des expériences passées qui n’ont abouti à rien. En les intégrant dans l’armée congolaise, ces tutsis congolais ont plutôt créé d’autres rebellions. Le M23 est une transformation de la rébellion rwandaise qui avait chassé Mobutu du pouvoir. Elle s’est transformée au fil des années, déjà en 2000, 2009, 2012,2013 et elle resurgit en 2021 estimant que le gouvernement congolais n’a pas respecté ses engagements de leur réinsertion dans l’armée congolaise. En trois ans, le M23 a connu un réel succès, occupant un vaste territoire dans l’est de la RDC. L’échec d’hier démontre que les deux parties n’arrivent pas à s’accorder sur les modalités et les préalables à toute négociation . A cela s’ajoute le manque de confiance : les relations entre les deux pays sont historiquement tendues, ce qui complique toute tentative de dialogue.

LES CONSEQUENCES DE CE BLOCAGE

On peut citer entre autres la poursuite de la violence : l’absence d’accord favorise la continuation des combats dans l’est de la RDC ; la crise humanitaire : la population civile est la première victime de ce conflit, avec près de 7 millions de déplacés et des exactions commises ; la dégradation des relations bilatérales : les tensions entrent les deux pays risquent de s’envenimer davantage. Même comme à Kinshasa et à Kigali, on parle de simple report des négociations, comme pour dire que le dialogue n’est pas rompu. L’avenir nous dira.

Jean Pierre Ombolo

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